La lecture : une affaire de coeur!

J’ai participé hier pour la première fois au travail d’un comité formé de représentants de plusieurs ministères. À cette occasion, nous était présenté le «Plan d’action sur la lecture à l’école» à qui le MELS veut sûrement donner une grande importance puisqu’il a ajouté un hyperlien sur la page de garde de son site officiel sous la signature «Et toi, que lis-tu?»
Vingt minutes de pur plaisir pendant lesquels Michel Clément (qui vient parfois faire son tour ici) nous a résumé les grandes lignes. Le plan comporte quatre types de mesures qui visent à inculquer aux jeunes le goût de lire davantage, entre autres. Je crois que le choix d’en faire un axe principal de la politique gouvernementale en matière de réussite scolaire est un bon choix :

«Apprendre la langue d’enseignement est un indicateur de réussite scolaire. Comprendre l’écrit est le fondement de l’apprentissage dans toutes les disciplines, au primaire comme au secondaire.»

Nous avons échangé Michel et moi sur le thème des Prix de Reconnaissance (pour les élèves et pour les établissements scolaires). Je lui racontais jusqu’à quel point j’ai eu peur qu’ils aient fait fausse route avec ce slogan «J’ai la tête à lire» dans le contexte où ils ciblent les garçons en particulier. Mais en discutant avec lui, j’ai eu tôt fait de constater que les gens à l’origine de l’initiative étaient sensibles aux émotions liées à la découverte de l’univers fascinant de la lecture. C’est qu’au début, j’ai été frappé par l’utilisation du mot «tête» dans le slogan…

Je crois tellement à «la magie» qui s’opère dans chaque enfant lorsqu’on fait attention à ne pas le mettre en contact avec n’importe quoi pour le faire lire comme en fait foi cet extrait d’un site de l’Université de Toronto:

«Lire, c’est vivre en quelque sorte un rêve éveillé. C’est visualiser les images qui émergent à la conscience, comme si on visionnait un film. Toute personne qui lit s’absente momentanément pour se réfugier dans un espace inaccessible aux autres. Lorsque nous examinons des enfants qui lisent dans les bibliothèques, nous sommes frappés par leur posture figée, leur état d’inaction et surtout leur air d’absorption. Malgré le silence extérieur, une grande activité intérieure mobilise l’enfant. Pour pénétrer dans cette réalité imaginaire, il suffit de se laisser entraîner par les mots et les phrases et d’aller à la rencontre de personnages fascinants dans des lieux inconnus.»

J’y ai repensé par après et je me suis dit finalement que c’était le bon énoncé («J’AI LA TÊTE À LIRE») pour exprimer que c’est une affaire de goût la lecture puisque c’est une émotion qu’on décrit par l’utilisation de l’expression «j’ai la tête à…» : avoir envie de… «ça me tente de».

Enfin… L’important, c’est de s’inscrire et de lire.

Je vais retourner faire un tour sur le site du plan global qui offrira bientôt une section «coffre à outils». Déjà, un lien mène aux événements à venir, dont un Colloque national sur le livre et la lecture qui aura lieu les 3 et 4 avril 2006 à Montréal.

Merci à Michel et à toute l’équipe de Lise Ouellet!

Tags:
1 Commentaire
  1. Photo du profil de MarcSt-Pierre
    MarcSt-Pierre 17 années Il y a

    Hors de tout doute raisonnable…
    Je l’ai pris sur la table du salon pour en lire des extraits. Le sous-titre était accrocheur : « Guide pédagogique destiné aux enseignants en difficulté» . Il s’agit d’un ouvrage de deux professeurs de l’UQAM, Jacques Forget et Normand Giroux. Ceux qui l’ont lu ont certainement, comme moi, été secoués par les impacts humains des enjeux de société qui y sont décrits: « Des milliards sont investis en éducation. En dépit de ce choix de société, le fait est avéré : plus du tiers des élèves n’obtiennent ni diplôme ni certificat de qualification. L’hypothèque collective que cela nous fait porter n’a d’égal que le spectre des souffrances personnelles portées et promises par l’analphabétisation, voie royale vers la misère. »
    On peut traduire cet enjeu en termes économiques : on va manquer de main-d’œuvre qualifiée parce que pas assez de jeunes sortent de l’école avec un diplôme; que ce phénomène est un obstacle au développement économique; que ce développement est essentiel pour produire de la richesse et que sans celle-ci, c’est, notamment, le filet de sécurité sociale qui est menacé. On connaît ce point de vue, il a ses ténors et il n’est pas sans fondement.
    On pourrait arguer qu’il est possible par l’immigration de pallier aux pénuries de ressources humaines ou que les entreprises pourraient davantage soutenir les jeunes, les personnes inactives et les travailleurs dans leurs cheminements de formation. Mais même des solutions comme celles-là ne nous permettent pas de faire l’économie d’un constat douloureux : les choix qu’on fait, comme société et aussi comme personnes, peuvent contribuer à maintenir le cycle de l’exclusion sociale et de la pauvreté. Si on peut importer des cerveaux, on peut difficilement exporter notre misère ou la cacher dans le placard pour la sortir le temps d’une campagne de cueillette de denrées périssables.
    J’ai répété à de multiples tribunes que l’apport principal de l’école à la lutte à la pauvreté et à l’exclusion, dans le cadre de sa mission propre, débutait par la maîtrise des meilleures approches disponibles pour favoriser l’apprentissage de la lecture et de l’écriture (lire est à écrire, ce que prendre est à donner). J’ai ajouté à cela que l’école et les enseignants ne peuvent pas faire tout le travail et qu’il importe que les familles, les quartiers et les villes, les organismes, les entreprises et les institutions tissent des liens serrés autour de leurs écoles avec comme objectif de développer le goût de la lecture et de la culture.
    Cet autre passage de Forget et Giroux est édifiant : « C’est vers huit ans que le clivage commence à s’accentuer entre bons et mauvais lecteurs. Les premiers prennent leur envol et leur rapidité de lecture accélère, à la conquête d’un nombre croissant de textes et de nouveautés. Les seconds ralentissent, et déjà ils délaissent une habileté incommodante, un outil non maîtrisé. C’est l’effet Mathieu, selon une idée originale de Stanovich, un chercheur qui a consacré l’essentiel de son travail à la lecture. Ce dernier établit une analogie à partir de la parole de l’évangéliste « (…) car à celui qui a, l’on donnera; mais à celui qui n’a pas, on enlèvera même ce qu’il a ». C’est ainsi que l’apôtre Mathieu évoque dans les Évangiles que les « riches s’enrichissent et les pauvres s’appauvrissent ». Appliqué à la lecture, cet « effet » indique les directions opposées que prennent les bons et les mauvais lecteurs, les uns vers la littératie et l’enrichissement personnel, les autres vers l’analphabétisme fonctionnel et l’appauvrissement culturel. »
    Si j’appelle tous ceux qui ont à cœur la cause des enfants à se serrer les coudes autour et dans leurs écoles, c’est parce l’école est un lieu incontournable : les enfants y passent de 30 à 60 heures par semaine. Si j’insiste autant sur l’apprentissage de la lecture, c’est parce que la lecture est un outil d’émancipation. Avant de lire pour apprendre, il faut apprendre à lire.
    Il faut repousser le plus loin possible la frontière au-delà de laquelle nous pourrions renoncer à agir pour qu’un enfant apprenne à lire ou qu’il lise pour apprendre. Nous savons que des approches sont meilleures que d’autres, que certaines d’entre elles peuvent profiter à certains enfants, à un moment ou à un autre de leur apprentissage, moins à d’autres. La bonne approche n’est pas prescrite : c’est celle qui fonctionne. Il en va également ainsi pour l’organisation des services. Quelle approche ou service, à quel moment, pour quel(s) enfant(s)?
    Il y a, dans la qualité et la valeur de l’éducation, des défis qui se gagnent ou se perdent classe par classe, qui dépendent de l’enseignant et de l’équipe qui l’entoure. La loi sur l’Instruction publique a décentralisé d’importants pouvoirs de décision aux écoles en matière de pédagogie en plus de reconnaître le droit et la responsabilité aux enseignants de choisir des outils didactiques, des approches pédagogiques et des outils d’évaluation.
    Il y a d’autres éléments, d’autres facteurs de qualité et de réussite, qui se gagnent école par école, famille par famille, quartiers par quartiers, quoi qu’essaient les enseignants individuellement ou les ministères de l’Éducation partout dans le monde. Ce que j’appelle le développement du goût de la lecture et de la culture fait partie de ces facteurs. Apprendre et appétit partagent la même racine latine. Savoir et saveur aussi…
    Je voudrais, en m’inspirant de propos d’Arthur Marsolais, , que l’école s’acharne au premier titre, conformément à sa mission première d’instruire, à outiller les enfants correctement en misant sur l’apprentissage de la lecture et en mobilisant sa communauté proche autour de cet impératif. Que l’école, également, comme institution, affiche haut et clair sa mission d’initiation culturelle et de transmission culturelle. Qu’elle, et tous ceux qui l’habitent ou l’entourent, affichent, travaillent et vivent ces missions si intimement liées avec autant de clarté et d’insolence, presque, que d’autres institutions affichent le souci de soigner les malades, ou d’enrichir leurs commettants, ou de divertir le public.
    Tous les enfants peuvent apprendre. Il faut chaque fois, pour chaque enfant, comme professionnel, parent, institution ou membre engagé d’une communauté, viscéralement et d’instinct refuser l’échec et l’abandon scolaire. À moins qu’il soit possible de démontrer et ce, hors de tout doute raisonnable, que tout a sincèrement été tenté.

Laisser une réponse

Contactez-moi

Je tenterai de vous répondre le plus rapidement possible...

En cours d’envoi

Si les propos, opinions et prises de position de ce site peuvent coïncider avec ce que privilégie le parti pour lequel je milite, je certifie en être le seul éditeur. - ©2022 Thème KLEO

Vous connecter avec vos identifiants

ou    

Vous avez oublié vos informations ?

Create Account

Aller à la barre d’outils