Un voyage formateur de jeunesse

Je vous salue internautes et lecteurs de Libération qui arrivez ici à la suite de la lecture de cet article qui paraît ce matin et qui fait partie du dossier «Pour 2016, on attend une net amélioration».

Je blogue avec grand plaisir depuis octobre 2002. Je vous invite à lire ce récit du futur qui a fortement inspiré les auteurs de la section «éducation» où j’interviens; je m’en voudrais de ne pas vous inviter ensuite à aller parcourir ce texte, plus réflexif, qui met en contexte cet exercice de prospective un peu casse-cou.

Sous l’hyperlien plus bas donc, je vous offre «Un voyage formateur de jeunesse». Si vous souhaitez en savoir davantage sur ma pratique du blogue, ces autres liens pourraient vous renseigner :

Enfin, un dernier mot pour vous dire que je me sert aussi de cet espace comme d’un carnet de voyage au moment où mon métier m’amène à l’extérieur de chez moi. J’ai fait trois séjours en France qui sont résumé dans ces trois séries de billets : Autrans, en janvier 2004, Dijon, en mai 2005 et Poitiers, à l’automne 2005.

Au plaisir…


Un voyage formateur de jeunesse
«On ne fait pas un voyage. Le voyage nous fait et nous défait, il nous invente.» (David Le Breton)

Eugène est très excité. Il part demain avec ses parents pour un an en Australie. Son père doit se rendre au pays des kangourous pour y vivre une année de ressourcement; tous les enseignants français au-delà du primaire qui ont cumulé dix ans d’expérience et qui reçoivent une cote «élevée» au b2i en formation continue peuvent profiter d’un congé sabbatique d’un an à condition de fournir un projet de formation accepté par cent de leurs élèves à qui ils n’ont pas enseigné depuis au moins cinq ans.

Mais Eugène se fout un peu de tout cela. Il est en ce moment très préoccupé à organiser ses moyens de rester en contact avec sa bande. C’est qu’à quatorze ans, les amis, c’est important. Et ce n’est pas un voyage d’une année qui va l’empêcher de rester cool aux yeux des potes de son groupe! Son vidéoblogue pour la durée de son voyage est en ligne, celui de son école est fin prêt aussi. Il peut le consulter de son téléphone bien entendu, mais il peut aussi y enregistrer ses contributions puisqu’une petite caméra y est intégrée.

Eugène n’a pas été très surpris de la réaction de son milieu scolaire à l’annonce de son départ. Il savait que Mme Chartrand (son prof répondant pour les cinq années de son parcours préuniversitaire) serait emballée par ce voyage. Elle a immédiatement ajusté son P.A.S. (Plan d’Année Scolaire) et l’a fait approuver par la direction de l’école. Il faut dire que depuis qu’Internet a fait son entrée dans la maison de Charlemagne, il s’en est passé des choses…

L’école existe encore. Le P.A.S. lui a fait faire beaucoup de chemin en faisant cesser ces parcours univoques et devenus de plus en plus stériles. L’institution est davantage un carrefour de ressources qu’une enclave à cheminements semblables. Les enseignants qui y oeuvrent ont renoncé à toujours passer pour les plus savants, leur rôle étant maintenant de conduire leurs élèves vers de plus savants qu’eux. Ces maîtres (et le fruit de leur travail) étant plus accessibles que jamais, les profs jouent un peu moins à ceux qui ont toute l’autorité. Ils utilisent plutôt leurs grandes qualités relationnelles et de bons arguments pour inspirer confiance en leur jugement. Ils savent reconnaître les endroits sur Internet (et ailleurs) où il y a des savoirs incontestables et des gens de valeur. Les sources vidéos, sonores et écrites foisonnent et ils connaissent l’art du repérage. Ils ne se gênent pas pour produire du contenu de qualité eux aussi, mais ils ne réinventent pas la roue à chaque année!

Et puis, il faut dire qu’Eugène publie sur le Web depuis qu’il sait écrire. Comme au foot (son sport préféré) ou au violon, il a appris à se produire en public par l’écrit et la critique ne le gêne pas. Il a découvert les avantages de se nourrir de cet exercice où il a développé son sens critique se forgeant ainsi une identité plus ouverte et moins narcissique. Il connaît le son que sa voix porte sur le Web et il s’est vu plus souvent à l’écran que dans un miroir.

Eugène a bien hâte de témoigner sur son blogue de ce qu’il apprend; on ne peut pas dire que ce soit une corvée d’envisager de faire la conversation avec son monde à partir de ses réalités du moment. D’autant plus que c’est sur cet outil qu’il pourra prendre connaissance des consignes données par Mme Chartrand et les autres enseignants de son école.
Aujourd’hui, c’est sa dernière rencontre face à face avec cette grande dame. Mme Chartrand ne vient pas souvent à l’école; elle est rémunérée par la commune à demi-temps pour suivre le parcours d’une centaine d’élèves jusqu’à leur arrivée à l’université ou au terme d’une formation terminale certifiée. Elle fait partie d’un projet pilote commencé voilà maintenant deux ans pour assurer le développement socio-économique du territoire. Elle a accès au dossier complet de chacun de ses jeunes, elle agit tel un « coach » avec chacun, mais n’est aucunement impliqué dans l’évaluation des apprentissages de ses ouailles. À l’école où elle travaille (l’autre moitié du temps), elle expérimente actuellement un nouvel outil qu’elle utilise autant pour la confection de ses activités en classe (elle enseigne seulement le matin) que pour le suivi de ses élèves.

Elle appelle ça un agrégateur pédagogique. Elle est abonnée à des fils de nouvelles des maisons d’édition qui lui proposent du matériel pédagogique produit par des enseignants et des auteurs qui acceptent de mutualiser leurs trouvailles. Ce système (financé au prorata des téléchargements) est financé par l’État et oblige les fournisseurs de contenu à travailler au service des enseignants. Elle est aussi « abonnée » à de nombreux wikis, blogues, médias et revues qui lui permettent de déconcentrer les savoirs de ses élèves et de ses sources d’information. Plusieurs des auteurs de ces dernières sources publient sous licence « Creative Commons ». Quand elle voit passer dans son agrégateur une page Web qui requiert son intervention ou lui en donne l’envie, elle y accède par un clic et prend quelques instants pour apporter sa contribution. De cette façon, elle participe à un vaste projet collectif de construction de sens.

Au programme de cette rencontre entre Eugène et sa répondante, la validation de toutes les stratégies de diffusion de contenu auxquelles son élève aura accès. Eugène privilégie le podcast qui lui permettra de son blogue de rapporter le contenu de ses rencontres et recherches. Il est prévu aussi d’utiliser la vidéoconférence pour les examens oraux que l’école doit lui administrer avant le congé des fêtes et en juin dans certains domaines d’apprentissage comme les sciences, la géographie et l’histoire. Il recevra les situations authentiques d’évaluation sur son blogue privé quelques jours avant l’entrevue vidéo. Le reste des évaluations se fera à partir de son portfolio électronique, évolution du blogue scolaire centré sur l’apprenant et bien utile pour l’enseignant chargé de l’évaluation des compétences en fin de cycle des apprentissages pour le compte de l’État.

Les parents d’Eugène partent donc pour ce périple satisfait que l’école soit devenue davantage une institution préoccupée par les apprentissages de ses élèves qu’ils proviennent ou non de son contrôle. Certes, plusieurs P.A.S. des amis d’Eugène sont plus directifs et prévoient un enseignement plus frontal, mais le fait que la direction de l’école et le ministère de l’Éducation nationale aient mieux intégré les nouvelles technologies a procuré à chacun de ses acteurs les moyens de leurs ambitions : qualifier et instruire chacun selon ce qu’il est et ce qu’il vit tout en maintenant un cursus rigoureux! De fait, les parcours sont différenciés, mais le curriculum d’État est unique.

Eugène se demande si le Kangourou ne devrait pas devenir partie intégrante de l’identification de sa page d’accueil de son E.N.T.* ? De grands sauts, un parcours rapide et des réserves dans sa poche du devant pour faire naître de nouveaux moyens d’apprendre !
*Environnement Numérique de Travail.

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2 Commentaires
  1. Photo du profil de LudwigDumortier
    LudwigDumortier 16 années Il y a

    bonjour a vous!
    j’aurai voulu vous demander si vous auriez pu m’aider car j’envisage de faire un tour complet de la france et essayer de visiter lé plus beau site naturel et sauvage et pour cela j’aurai aimé savoir comment j’aurai pu m’y prendre je vous remercie d’avance et bonne continuation

  2. Photo du profil de Mario Asselin
    Mario Asselin 16 années Il y a

    Désolé de ne pas pouvoir vous aider plus que cela… J’habite le Québec!

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