Un peu de Québec… au Tchad

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec dans la section « blogue ».

On a souvent dit du tissus social de la Ville de Québec qu’il était à 95% francophone, blanc et catholique. Autour des années 2005, la capitale regroupait autour de 9% de la population de la province, mais n’accueillait qu’environ 3% des 45 000 immigrants qui entraient chaque année au Québec. Et Québec avait beaucoup de peine à les retenir.

C’était avant.

Les dirigeants de la Ville de Québec ont agi dans les dernières années pour que la ville améliore sa sensibilité face aux enjeux de l’immigration et ils ont mis en place des conditions plus favorables pour l’accueil et l’insertion socioéconomique des gens désireux d’être accueillis à Québec.

L’histoire personnelle de Mamadou Djimtebaye le confirme.

Né au Tchad, il fait ses études universitaire en France où il éprouve certaines difficultés d’intégration. En 2008, par le biais d’un programme d’échange entre l’Université de Picardie Jules Verne (Amiens) et l’Université Laval, il entreprend des études de niveau maîtrise en affaires électroniques, attiré par le secteur des technologies de l’information. Internaute curieux, il perçoit qu’au Québec, il pourra y trouver l’inspiration et l’occasion de parfaire ses connaissances.

Il découvre l’hiver québécois et tombe en amour avec la population de la Ville de Québec, dont il compare la taille avec N’djamena, la capitale de son pays, la république du Tchad.

Je suis allé à sa rencontre ce matin parce que j’ai appris par sa présence sur les médias sociaux qu’il s’était beaucoup investi dans des petites entreprises qui ont pignon sur le Web et qu’il quittait sous peu, pour un retour en Afrique. J’étais curieux d’en savoir plus sur ce qu’il retient de sa vie à Québec. Il en avait beaucoup à dire…

L’heure africaine étant ce qu’elle est, je l’ai attendu une vingtaine de minutes à Place D’Youville. Il n’avait pas beaucoup dormi puisque ses derniers préparatifs de voyage avaient écourté sa nuit. Après l’avoir taquiné un peu, nous sommes allés prendre un café.

On a beaucoup parlé de sa vie à Québec, de ses efforts à mettre sur pied le portail d’information sur l’actualité tchadienne et internationale Tchadinfos.com et surtout, de sa vie de jeune entrepreneur à Québec. Dès son arrivée à l’Université Laval, Mamadou avait été impressionné de l’accueil et de l’ouverture des gens de Québec. Après un début de conversation où nous échangeons des civilités, son débit s’est beaucoup activé au récit de ses efforts à s’intégrer à la vie des gens d’ici et à participer aux activités d’intégration organisées par la Ville de Québec. Joueur de basket, il a évoqué le sport intra-muros à Laval. Avide lecteur grâce à son papa, il a mentionné ses nombreuses heures passées à la Bibliothèque Gabrielle-Roy. Bien-sûr, ses rencontres avec des gens de la communauté du numérique à Québec ont façonné sa compréhension de notre mode de vie, mais le «déclic» s’est rapidement fait : il deviendra entrepreneur!

Après quelques mois où il porte son t-shirt où il est écrit dans son dos «apprenti-québécois», au basket, on lui dit qu’il est maintenant des nôtres et qu’il n’a plus besoin de ce chandail. Il m’avoue l’avoir conservé, mais il était très honoré de se sentir passer ainsi à un autre stade d’intégration.

Ses nombreuses participations à des WebCamp l’ont rapidement mis en contact avec des gens capables de lui infuser la culture Internet qu’il dit maintenant vouloir rapporter au Tchad. Cette culture de collaboration, de partage et de créativité lui permet d’imaginer la suite de son parcours, parsemé d’aller-retour entre l’Afrique et le Québec. Il sent le besoin de retourner chez-lui parce qu’il veut accélérer le développement de ses entreprises tout en redonnant aux siens.

Tchadinfos.com emploie cinq collaborateurs qui sont au Tchad, en dehors de ses autres partenaires d’ici au Québec. Il est fier de pouvoir dire que Tchadinfos est devenu une sorte de référence en information, pour son pays. Le site permet d’avoir accès à une grande partie des titres de la presse nationale puisque très peu de journaux disposent d’un site Web, au Tchad. Parmi ses nombreux projets, il souhaite peaufiner son modèle d’affaires, ce qui devrait rapidement progresser avec sa participation au 1er Salon international des technologies de l’information et de la communication qui a lieu en septembre.

Ce qui surprend le plus de son témoignage est le fait qu’il attribue aux gens de Québec sa vocation d’entrepreneur «puisqu’ici, ce qu’on ne peut pas faire, on l’invente…». Aussi, il parle abondemment de ses copains de Côté-d’Ivoire ou de Guinée qui tout comme lui aiment la Ville de Québec et y apprécient sa qualité de vie. Il évoque l’agence de certains d’entre eux qui ont suivi le même parcours que le sien, axé sur le travail bien fait et la créativité.

Il prévoit continuer de travailler avec ses partenaires de Québec et anticipe même s’ennuyer de l’hiver, prévoyant son prochain séjour parmi nous en janvier 2015.

Autant pour Saomedia qu’en ce qui concerne Tchadinfos, il croit pouvoir développer la croissance de ses affaires au Tchad par le transfert de connaissances auprès de nouveaux collaborateurs qu’il entend former, «à la québécoise», mais en Afrique. Il rêve à une passerelle entre l’Université Laval et l’Université de N’djamena.

Sur son profil LinkedIN, il se décrit comme un «Afro-optimiste». Le jeune homme que j’ai rencontré ce matin est rempli de reconnaissance envers sa patrie d’adoption. Il me semblait en l’écoutant, qu’il représentait assez bien tout le progrès réalisé par Québec dans sa capacité de mieux intégrer en son sein, la différence.

La meilleure des chances à toi, Mamadou, et au plaisir de te revoir, en janvier!

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1 Commentaire
  1. […] déjà parlé ici du parcours de Mamadou Djimtebaye, né au Tchad et Québécois d’adoption. Il est de retour à Québec pour quelques jours, […]

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