Ces enseignants et ces élèves qui attendent en vain des tablettes numériques

Note : Ce billet a d’abord été publié au Journal de Québec et au Journal de Montréal dans la section « blogue ».

Plusieurs écoles publiques avaient placé des commandes pour des tablettes numériques suite à des achats qui datent de l’automne 2014. Elles ne seront pas livrées en ce début d’année 2015 parce que le processus d’appel d’offres du Service des achats regroupés du Centre collégial des services regroupés a été annulé, le 15 décembre dernier. Quand on enseigne dans une école publique du Québec et qu’on a obtenu l’autorisation d’utiliser une tablette numérique avec des élèves, c’est très compliqué…

On pourrait interpréter cette nouvelle de deux façons.

D’une certaine manière, les contribuables du Québec peuvent être rassurés, les différents services d’achats regroupés que ce soit au Centre de services partagés du Québec (CSPQ) ou au Centre collégial des services regroupés (CCSR) viellent au grain et s’assurent que le prix payé en argent public pour un bien soit le plus bas possible, au point où parfois, on est prêt à sacrifier la possibilité de pouvoir réaliser l’achat à un processus qui n’offre pas toutes les garanties recherchées.

Pour les enseignants et les élèves des écoles publiques du Québec qui étaient en attente, suite à des commandes placées l’automne dernier, il faudra prendre son mal en patience car le matériel n’est pas prêt d’arriver dans les écoles.

On se souviendra dans le dossier des tableaux blancs interactifs (TBI) que 40 000 unités devaient être achetés sur cinq ans dans le cadre d’un projet lancé en 2011 par le gouvernement Charest. On a abondamment parlé du cafouillage entourant ce programme d’une valeur de 240 millions de dollars qui semblait avoir favorisé une marque en particulier – Smart Technologies. «Tableaux payés plus cher que leur valeur estimée», «faible concurrence entre soumissionnaires», «absence de reddition de comptes sur l’efficacité des tableaux interactifs» : plusieurs lacunes administratives avaient été identifiées.

On ne peut pas parler d’un projet gouvernemental en bonne et due forme concernant l’utilisation des tablettes numériques dans les classes, mais le sujet est dans l’air du temps. Contrairement aux TBI qui sont loin d’avoir prouvé leur utilité en éducation, l’usage des tablettes semble plus prometteuse. J’ai publié sur ce blogue un billet qui faisait le tour du sujet à l’occasion de la rentrée 2014, « Des iPad pour tous les élèves ». L’intérêt pour les tablettes numériques en éducation n’a pas diminué depuis ce temps, je peux vous l’assurer.

Ce qui semble poser problème dans cette semaine de retour en classe réside dans le fait que plusieurs directions d’écoles publiques ont annoncé aux enseignants et aux élèves qu’ils ne pourront pas disposer des tablettes qu’ils attendaient, du moins pas dans les quantités attendus, quand «ils sont chanceux».

Quelques recherches et témoignages m’ont conduit sur le site du CCSR où il semblait possible de s’approvisionner et la situation est la suivante : à la demande du MELS, le processus d’appel d’offres des tablettes numériques a été annulé.

«Le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) a mandaté le CCSR pour réaliser cet appel d’offres dont l’objectif principal était d’assurer aux institutions d’enseignement qu’elles aient accès aux meilleurs outils offerts sur le marché et au meilleur coût possible en tenant compte des divers besoins technopédagogiques. Au 29 octobre dernier, les soumissions reçues de divers fournisseurs ne nous permettaient pas de concrétiser cet objectif.»

Tous les gens consultés me parlent de processus lourds, mais tout le monde semble de bonne foi dans le dossier. Le problème est de conjuguer les impératifs de saine gestion de l’argent public avec les prérogatives des fournisseurs et les besoins des clients. Actuellement, il est difficile de dire ce qui va se passer à court terme, le CCSR disant vouloir «prendre un temps de recul afin d’évaluer la suite» à donner au dossier des tablettes numériques.

Pendant ce temps-là, les écoles privées, des entités administratives autonomes de plus petites tailles que les commissions scolaires, semblent moins concernées par les difficultés d’approvisionnement puisque chaque commande est souvent en dessous du montant qui nécessite de gros processus d’appels d’offres. Évidemment, les écoles privées ne sont pas obligées d’acheter via les commissions scolaires ce qui semble aussi, grandement faciliter les choses, en pratique.

Dans ce contexte où de nombreux enseignants veulent innover, autant dans les écoles publiques qu’au privé, je déplore toutes les obstructions qui compliquent les démarches des profs et des élèves du public qui attendent après leurs tablettes. C’est déjà très difficile pour des enseignants d’avoir à faire cheminer leurs projets d’innovation dans les dédales administratifs où de nombreux paliers se mettent le bout du nez et manifestent leurs exigences, quand on autorise leur commande d’équipements, il me semble qu’on ne devrait pas avoir à faire face à autant de difficultés d’obtenir satisfaction.

Je comprends les impératifs qui régulent les processus d’achats regroupés. Je suis pour une saine gestion des argents publics et bien sûr, je privilégie le jeu de la concurrence qui doit exister dans le commerce qu’il se déroule dans le secteur scolaire ou autre, mais je peux facilement accueillir la frustration des enseignants et des élèves qui se font dire que les tablettes qu’ils attendent ne sont pas disponibles comme prévu et qu’on ne sait pas quand elles le seront.

C’est dans ce genre de contexte que mes préjugés envers la bureaucratie et les grands ensembles administratifs se manifestent le plus.

Si quelqu’un possède de meilleurs nouvelles que les miennes pour ces enseignants des écoles publiques qui attendent les tablettes numériques pour leurs élèves, n’hésitez pas à nous les communiquer par le biais des commentaires ci-bas…

N.B. Parlant des problèmes avec l’informatique, un nouveau blogueur qui a beaucoup à écrire sur le sujet vient de faire son arrivée dans la section blogue du Journal et je vous invite à le suivre, Jean-Nicolas Blanchet. Dans son premier billet, il nous annonce qu’il change de métier !

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